Une pause pour l'EUDR ?
Ces dernières années, l'Union européenne s'est fait un nom en adoptant des réglementations environnementales strictes. Celles-ci sont parfois justifiées. Souvent, il s'agit de l'arrogance bureaucratique d'un tigre de papier. La durabilité est un défi structurel pour tous les secteurs. L'industrie de l'imprimerie n'y échappe pas non plus. Mais à la lecture de l'EUDR - le nouveau règlement européen contre la déforestation - on peut se poser de nombreuses questions. Qui signe un système aussi complexe et inapplicable, et que doit faire l'imprimeur local avec ce règlement ?
Le règlement européen sur la déforestation (EUDR) impose aux grandes et moyennes entreprises de prouver, à partir du 30 décembre 2025, que leurs produits - du bœuf au cacao, en passant par le papier - ne contribuent pas à la déforestation. Les petites entreprises ne devront se conformer au règlement EUDR qu'à partir du 30 juin 2026. Cela signifie qu'elles devront documenter l'origine de chaque matière première, tenir à jour une déclaration de diligence raisonnable, échanger des données avec leurs fournisseurs et leurs clients, et rendre compte de tout cela à la Commission européenne. Une noble aspiration, mais en pratique une opération irréalisable pour la plupart des imprimeries. Peut-être l'IA peut-elle aider ?
Les entrepreneurs devraient-ils vraiment se préoccuper aujourd'hui de savoir avec précision de quelle plantation provient la pulpe d'un type de papier donné ? Et comment cette pâte, après une série de processus chimiques et logistiques, se retrouve dans un dépliant, un magazine ou un livre ? Selon les estimations de l'industrie, un livre imprimé - en fonction du type de papier et du tirage - peut contenir les traces de 300 000 parcelles forestières. Chaque parcelle a sa propre référence, toutes doivent être enregistrées et faire l'objet d'une traçabilité. Il ne s'agit pas d'une politique environnementale, mais d'un surréalisme administratif.
Intergraf, la fédération européenne des industries graphiques, tire à juste titre la sonnette d'alarme au moment où ce numéro est mis sous presse. Elle réclame un mécanisme de "stop-the-clock" : il suffit d'appuyer sur le bouton "pause" et d'examiner d'abord correctement la manière de rendre ces règles applicables. Il ne s'agit pas d'affaiblir l'objectif environnemental - l'industrie l'approuve totalement - mais d'éviter une situation où nous serons bientôt coincés avec une loi qui semble bonne sur le papier mais qui conduit à la stagnation dans l'atelier.
Qu'est-ce qui pourrait fonctionner ? Traçabilité sur les grandes lignes. Enregistrez le nom du fournisseur de votre papier et l'identité de votre client. Pas de fichiers de données interminables avec des numéros de colis, mais des chaînes transparentes qui restent gérables d'un point de vue administratif.
Les entrepreneurs de l'imprimerie sont heureux d'apporter leur contribution. Ils n'ont aucune objection à l'utilisation responsable du papier - au contraire, ils travaillent avec depuis des années. Mais donnez-leur les outils et les délais nécessaires pour le faire de manière réaliste. Une loi environnementale qui n'est pas applicable n'a pas de sens. Il y a déjà suffisamment de règles. Ce n'est pas ainsi que nous créerons un avenir durable, mais de la frustration, de l'incertitude et peut-être une accélération de la sortie de notre secteur d'un nombre encore plus grand de petits acteurs. C'est donc un signal d'alarme qu'il faut lancer. Non pas contre l'EUDR, mais pour sa mise en œuvre raisonnable. Bonne lecture !

