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Bioplastiques bon marché à partir de microorganismes, d’eau de mer et de déchets 

Une recherche de la VUB 

L’avenir est aux bioplastiques, assure le groupe de recherche Microbiologie de la VUB, placé sous la direction de la Professeure Eveline Peeters. Il faudra toutefois en aligner différents types pour remplacer les quantités colossales de plastiques traditionnels. 

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Le but de la recherche est d’obtenir de plus hauts rendements et de meilleures caractéristiques physicochimiques pour les bioplastiques produits avec Haloferax mediterranei

Le chercheur Brendan Schroyen attend d’ores et déjà beaucoup des bioplastiques produits à l’aide du microorganisme Haloferax mediterranei. L’intérêt? Une réduction spectaculaire des coûts de production. Ce 'microbe' s’acquitte en effet de sa tâche dans un milieu salin à l’extrême. Tant et si bien qu’il n’est besoin de prendre quasi aucune précaution pour prévenir une contamination.

Pas d’hier

L’idée de faire fabriquer des bioplastiques par des microorganismes n’est pas neuve. "Les premières traces de ce ‘processus de production biologique’ remontent à l’année 1900", confie Schroyen. "Les techniques et les microorganismes permettant de produire des bioplastiques à grande échelle ne font toutefois l’objet de recherches que depuis quelques décennies. Haloferax mediterranei a ainsi été isolé pour la première fois dans un marais salant d’Alicante et des chercheurs espagnols sont parvenus voici quelques années à lui faire fabriquer plusieurs variantes de bioplastique. Le seul grand défi consiste à présent à accélérer la croissance de ce microorganisme pour ainsi augmenter la production des bioplastiques. C’est précisément cet écueil que le groupe de recherche Microbiologie de la VUB se propose de lever, à côté d’autres projets similaires. Une seule et unique souche ne suffira en effet jamais à produire à terme suffisamment de bioplastique pour mettre entièrement fin à l’utilisation du pétrole dans la fabrication des plastiques." 

Eau de mer recyclée

Ce n’est pas un hasard si Schroyen axe spécifiquement son doctorat sur Haloferax mediterranei. "Ce microorganisme offre la réponse parfaite pour lever l’obstacle numéro un à une véritable percée des bioplastiques: le coût de revient de la production", explique-t-il. "Haloferax mediterranei est ce que l’on appelle un extrêmophile, c’est-à-dire un organisme capable de survivre dans des conditions extrêmes. Plus concrètement, il est parfaitement à l’aise dans un milieu très salé. D’où plusieurs avantages. Tout d’abord – et c’est un atout non négligeable – nous pouvons utiliser de l’eau de mer plutôt que de l’eau potable, qui devient denrée rare dans le monde. Nous devons certes quintupler les concentrations de sel, ce qui s’accompagne d’une certaine empreinte écologique. Mais nous nous faisons fort de toujours réutiliser la même eau après épuration. En d’autres termes, chaque processus de production n’exigera qu’une petite quantité supplémentaire de sel." 

Risque de contamination réduit

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Haloferax mediterranei prospère en milieu salin

Le fait qu’Haloferax mediterranei prospère en milieu salin présente un autre avantage économique de taille. "La production des bioplastiques par les autres microorganismes exige des conditions extrêmement stériles et conditionnées", poursuit Schroyen. "La moindre bactérie aérienne qui se retrouve dans l’eau peut perturber l’ensemble du processus et rendre le bioplastique inutilisable. Les mesures à déployer pour prévenir une telle contamination sont précisément ce qui rend le processus de production si onéreux. Avec Haloferax mediterranei, plus besoin de s’encombrer de ces précautions : aucune bactérie de l’air ne pourrait en effet survivre dans le milieu salin de prédilection de ce microorganisme. Ce qui, en plus de réduire le coût de revient des bioplastiques, élargit aussi fortement le choix des lieux de production possibles." 

Des flux de déchets comme substrat nourricier

Troisième avantage : Haloferax mediterranei peut se développer sur une grande diversité de flux de déchets industriels. "De quoi rendre la production de bioplastiques vraiment circulaire", s’enthousiasme Schroyen. "Le glycérol, par exemple, qui est un sous-produit important de la fabrication du biodiesel, constitue un substrat idéal pour le microorganisme. L’intégration des deux productions sur un même site est un cas d’école de circularité. Haloferax mediterranei peut aussi se développer sur de la mélasse – résidu de production de l’industrie sucrière – ou du lactosérum (petit-lait) – sous-produit de l’industrie fromagère." 

Plastiques rigides ou souples

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Brendan Schroyen: "Aucune autre bactérie aérienne ne pourrait survivre dans le milieu salin de prédilection d’H. mediterranei"

Concrètement, le groupe de recherche a mené des cultures en laboratoire d’Haloferax mediterranei sur une large diversité de matières, lesquelles ont débouché sur la production naturelle d’un polymère de type polyester. "C’est-à-dire, une longue chaîne d’atomes de carbone qui – une fois isolée de l’organisme – présente des propriétés assez proches de celles du plastique", précise Schroyen. "Ce bioplastique appartient à la famille des polyhydroxyalcanoates. Avec Haloferax mediterranei, nous pouvons construire des copolymères à deux motifs: polyhydroxybutyrate-co-hydroxyvalérate, ou PHBHV. En modifiant le rapport entre ces deux monomères – ce qui est possible selon 'l’aliment' servi aux microorganismes – on peut obtenir des bioplastiques de propriétés variables, des plus durs aux plus souples. Autrement dit, ce microorganisme nous permet de fabriquer des solutions sur mesure pour un large éventail d’applications. Nous voyons notamment beaucoup de potentiel pour l’industrie de l’emballage, car les propriétés des matériaux sont similaires à celles des emballages d’aujourd’hui. Nous pouvons en outre en créer qui présentent une imperméabilité aux gaz et à l’eau, ce qui offre des possibilités pour les feuilles et films d’emballage d’aliments. Les opportunités ne demandent également qu’à être saisies sur le marché des couverts, assiettes et gobelets à usage unique." 

La percée, pas pour tout de suite 

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Le groupe de recherche a cultivé Haloferax mediterranei en laboratoire

Mais pour Schroyen, la première grande percée s’opérera dans les marchés à haute valeur ajoutée, comme le monde médical. "Le coût de revient y est moins déterminant que dans l’industrie de l’emballage. Nos bioplastiques conviennent ainsi idéalement comme 'supports' de nouvelles cellules pour les transplantations de peau chez les grands brûlés. Ce ‘plastique’ étant biodégradable, le support est évacué de manière naturelle une fois que les cellules de peau ont pris. Des réussites comme celle-là vont indubitablement contribuer à encourager une percée des bioplastiques dans d’autres secteurs. C’est que le chemin est encore long, surtout concernant les types de plastiques à produire avec les microorganismes. Outre le coût élevé, beaucoup de mythes circulent encore sur l’incompatibilité des bioplastiques avec le processus de traitement des plastiques traditionnels. Car ce sont bien des mythes : les modifications à apporter à l’appareil de production sont souvent bien plus mineures que ce que l’on pense généralement. Il ne reste en fait qu’un seul grand obstacle à la percée des bioplastiques : l’absence d’un système séparé de tri, collecte et recyclage. Ces matériaux ne peuvent en effet pas être traités avec les plastiques conventionnels. Une telle filière n’est pourtant pas impossible à mettre en place. La preuve : cela a été fait à grande échelle au Japon." 

Échelle industrielle

Le premier objectif de la recherche actuelle de Schroyen est de comprendre les mécanismes moléculaires à l’œuvre derrière l’accumulation naturelle de bioplastique par le microorganisme. "Le but est d’exploiter cette connaissance pour obtenir de plus hauts rendements et de meilleures caractéristiques physicochimiques pour les ‘bioplastiques’ produits avec Haloferax mediterranei. Nous avons bon espoir de trouver, dans un avenir proche, une solution qui rendra possible l’application à grande échelle de ce type de bioplastique. Nous pouvons en tout cas déjà compter sur un intérêt assez fort de l’industrie." 

Photographie: VUB

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Écrit par Els Jonckheere2 septembre 2024

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